AFP : Assassinat du juge Borrel, le président djiboutien mis en cause par des témoins

© AFP, le 28 septembre 2006.

La responsabilité présumée du président djiboutien Ismaïl Omar Guelleh dans
l'assassinat du juge Borrel, en 1995 à Djibouti, est évoquée par des témoins
cités dans des courriers attribués à la juge chargée de l'affaire et publiés
jeudi sur un site spécialisé dans les documents confidentiels.

Selon le site, ces courriers auraient été adressés le 17 septembre 2004 à
Dominique de Villepin, alors ministre de l'Intérieur, et à Michèle Alliot-Marie,
ministre de la Défense, pour réclamer la déclassification de pièces relatives à
l'affaire Borrel.

Une note attribuée à la Direction centrale des renseignements généraux (DCRG),
détaillant "des affaires" dans lesquelles Omar Guelleh aurait été impliqué avant
d'accéder à la présidence de Djibouti, est également diffusée sur le même site
(géopolitique.com) créé par Guillaume Dasquié, auteur d'ouvrages sur le
renseignement et le terrorisme.

Cette note, versée au dossier d'instruction, a été authentifiée par Pierre
Lelong, président de la Commission consultative du secret de la défense
nationale, a indiqué à l'AFP Me Olivier Morice, avocat de la famille Borrel.

Dans les courriers attribués à la juge en charge de l'affaire, Sophie Clément,
celle-ci explique qu'un ancien officier de la garde présidentielle, Mohamed
Saleh Aloumekani, a déclaré dans la procédure avoir entendu plusieurs hommes
venir rendre compte en 1995 à Omar Guelleh "de l'assassinat du juge et de la
disparition des traces du crime".

Selon le site, elle rapporte également dans ces courriers que le chef de la
sécurité du palais présidentiel a affirmé avoir entendu M. Guelleh dire au
directeur de la sécurité que "le juge européen les dérangeait".

Toujours selon ce site, la magistrate cite enfin le récit de deux djiboutiens
proches des services secrets de leur pays qui auraient affirmé aux services
français que "le clan de l'actuel président de la République de Djibouti aurait
commandité l'assassinat du juge Borrel".

Concernant la recherche du mobile de l'assassinat, Mme Clément souligne dans ses
courriers les liens qu'entretenaient le juge Borrel et le juge Roger Leloire,
chargé de l'enquête sur l'attentat au Café de Paris de Djibouti (un mort, 15
blessés en septembre 1990, ndlr), à propos de ce dossier.

"Or, les policiers en charge de l'enquête sur cet attentat ont mis au jour
l'hypothèse d'une manipulation de l'enquête par les services spéciaux
djiboutiens dirigés par Omar Guelleh", précise la juge française.

L'éventuelle implication d'Omar Guelleh dans cet attentat est également évoqué
dans la note de la DCRG.

"Ismaïl Omar pourrait être le commanditaire de l'attentat du café de Paris. Le
dossier présenté par les autorités locales sur cet attentat serait en fait une
manoeuvre d'intoxication", expliquent les RG dans la note reproduite par le
site.

La note détaille également d'autres "affaires" dans lesquelles Omar Guelleh
aurait été impliqué avant d'accéder à la présidence de Djibouti. Sont cités
notamment un trafic d'ivoire en 1986-87, un trafic d'armes en 1989, un trafic
d'alcool détaxé en 1989 et un détournement d'armes venant d'Irak en 1990.