Le Point : Portrait de l’expert es services secrets

© Le Point, le 4 avril 2003.

En l'espace de quelques mois, ce journaliste de 37 ans s'est imposé comme
l'expert ès barbouzes qui monte. Depuis le 11 septembre, on ne voit et n'entend
plus que lui dès qu'il s'agit de savoir ce qui se chuchote du côté des «grandes
oreilles». Si bien que France 2 s'est attaché l'exclusivité de ses services dès
le début du conflit (il a décliné une offre supérieure de TF1).

On le croit tellement bien renseigné qu'on l'imagine prendre chaque matin son
café avec un agent de la CIA, jouer au tennis, entre 12 et 14 heures, avec un
ancien du KGB ou faire des plans de vacances avec un officier traitant du
Mossad.

La vérité risque de décevoir: Guillaume Dasquié n'a jamais ouvert un livre de
Robert Ludlum et son père n'était pas un «espion-qui-venait-du-froid», mais un
marchand de meubles qui venait du Sud (Cahors).«Quand je rentre chez moi, je
parle davantage chiffons avec ma chérie, qui est dans la mode, que des plans
secrets de l'administration Bush», dit-il pour achever de pulvériser le mythe.

Sa carrière débute sur Radio Nostalgie, d'où il se fait virer pour avoir
critiqué les costumes du patron! Il enchaîne à Canal +, dans l'équipe de
Jean-Luc Delarue, alors présentateur de «La grande famille». C'est à la suite
d'un passage sur RTL 2 que tout bascule. «J'avais reçu un gros chèque
d'indemnités. Au lieu de m'acheter un appartement, j'ai pris deux ans pour écrire
un livre sur l'intelligence économique», raconte celui qui, aujourd'hui, dirige
Intelligence Online, une lettre confidentielle sur le Renseignement, dont il
reconnaît un taux d'approximations de 20 %.

Le jeune Guillaume était «monté» à Paris achever des études de sociologie. Mais
sa formation, il la doit à Philippe Madelin, baroudeur de l'enquête et ancien
grand reporter à TF1. Le vieux briscard écrit des livres rigoureux«presque pour
un public de juges d'instruction». Guillaume Dasquié lui servira de «petite
main».

Intelligence Online (735 euros par an) compte aujourd'hui 600 abonnés (60 %
d'entreprises, 40 % d'administrations). Et non des moindres! Le Pentagone (via
la Defense Intelligence Agency) et la Maison-Blanche (via le comité consultatif
du renseignement) s'y abreuvent, de même que le Foreign Office britannique et
certains clients au Liban, en Egypte, en Syrie (ministère de la Défense) et en
Iran...

«Pour les Américains, je suis le suppôt de la DGSE. Et pour la DGSE je suis la
gorge profonde de la CIA», s'amuse cet auteur à succès. Car sa notoriété doit
beaucoup à son best-seller «Ben Laden: la vérité interdite»: 90 000 exemplaires
écoulés en France, 250 000 à l'étranger... Le livre n'a été publié ni en
Afghanistan ni au Pakistan.