Attentat de Karachi, l’ISI montré du doigt

[Cette enquête a été initialement publiée dans Libération datée du 22 novembre 2010]

L’enquête antiterroriste visant à retrouver les auteurs de l’attentat du 8 mai 2002 met peu à peu en évidence le rôle équivoque des services secrets pakistanais de l’ISI dans la tragédie, à mesure que progresse la procédure contre les accusés de la première heure.

Trois militants islamistes ont été accusés, dès 2003, d’être les auteurs de l’attentat : Mohammad Rizwan, Asif Zaheer et Mohammad Sohail. D’abord condamnés à mort, ils ont été relaxés en appel, faute de preuves suffisantes, le 30 mai 2009 (pour les deux premiers) et le 5 octobre 2009 (pour le troisième). La Cour suprême du Pakistan doit maintenant examiner leur cas, après un pourvoi du ministère public. En l’état, leur dossier ne semble pas contenir d’éléments matériels nouveaux, selon les avocats pakistanais, basés à Karachi et chargés de les défendre.

A Paris, il y a plus d’un an, les enquêteurs ont reçu 101 pages de notes des services secrets français de la DGSE consacrées à ces trois personnes. La liasse transmise par le ministère de la Défense comporte de nombreux paragraphes rendus volontairement illisibles. Dans l’ensemble, les notes reprennent les premières conclusions des policiers pakistanais.

Mais elles affirment en plus l’implication dans l’attentat d’un important chef islamiste, Amjad Farooqi, répétée à plusieurs reprises dans ces papiers. Et désigné comme le cerveau présumé. Son nom apparaît également dans la procédure américaine contre les auteurs de l’enlèvement et de l’assassinat de Daniel Pearl, à Karachi, en 2002.

Les notes de la DGSE envoyées au juge parsemées de trous affirment avec force son implication dans l’affaire. Or, ce gros bonnet des islamistes, tué en 2004 par les forces de sécurité pakistanaises, passe pour un supplétif des services de l’ISI. Notamment à travers son groupuscule Harakat al-Moudjahidine. Une note de la DGSE d’octobre 2001, non déclassifiée elle, pointe cette relation. Et des rapports déclassifiés des services américains confirment de tels liens. En France, en 2002, peu après l’attentat, le général Rondot, haut responsable du renseignement, évoquait dans ses carnets une éventuelle responsabilité de l’ISI.

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